La
Bandera Estelada par Joan-Pere
Pujol. Traduit du catalan
par l'auteur.
Selon
les critères officiels
en Catalogne, le rapport des dimensions
des côtés (longueur
et largeur) est de 3 sur 2, soit
1,667. Il s'agit certainement
d'un choix assez ancien. En effet,
un timbre de 1918 dédié
à la Société
des Nations reproduit une estelada
présentant les mêmes
proportions.
Le ratio 3 sur 2 n'est pas une norme internationale.
Chaque pays est libre d'adopter
celui de son choix. En l'occurrence,
l'estellade se conforme à
un usage établi aux XIXe-XXe
siècle, surtout en Europe,
usage sans doute inspiré
par le drapeau tricolore français.
On observera que le nombre d'or
(1,618) se rencontre surtout dans
le domaine de l'art ou de la construction.
Le drapeau indépendantiste
reproduit deux éléments
de la bannière étoilée
nord-américaine : la couleur
bleu foncé et l'étoile
blanche. Il s'agit d'un hommage
rendu aux Etats-Unis et à
leur Président Thomas Woodrow
Wilson (1856-1924), l'émancipateur
des peuples et prix Nobel de la
Paix en 1919. Une autre source
d'inspiration est le drapeau cubain.
Créé en 1849 par Miguel Teurbe Tolón,
il comporte un triangle accompagné
d'une étoile à cinq
branches. Cette colonie espagnole
avait obtenu son indépendance
en 1898 et inspiré les
nationalistes catalans. On considère
l'activiste et politicien Vicenç-Albert
Ballester (1872-1938) comme
le créateur de l'estellada.
Ce personnage, qui résida
quelque temps à Cuba, était
un fervent admirateur du peuple
cubain en lutte contre l'empire
espagnol.
A la fin de la Grande Guerre,
Ballester présidait le
Comité Pro-Catalunya dont
l'objectif était d'obtenir
l'indépendance de la Catalogne.
Il considérait nécessaire
la création d'un drapeau
de combat pour que les Catalans
et les puissances étrangères
puissent clairement visualiser
les aspirations indépendantistes
du peuple catalan. Le nouveau drapeau fut dans un
premier temps connu sous l'appellation
de «bandera de l'Estat català».
En 1928, le gouvernement catalan
en exil à Cuba l'adopta
comme le drapeau de la République
Catalane.
La
symbolique est la science des symboles.
Ceux-ci sont des signes figuratifs,
des êtres animés ou des
choses représentant un concept.
Ils constituent la figuration matérielle
d'une réalité plus abstraite
qui dépasse la connaissance immédiate. Dans la nature, tout est symbole...
La légende de la création
du drapeau catalan par Charles le Chauve
est souvent interprétée
comme une sorte de droit à l'autodétermination
sur tous les territoires reconquis sur
les Sarrasins. On peut aussi la comprendre
comme une leçon politique et
morale : la primauté du sang
(de la communauté) sur l'or,
c'est-à-dire sur les intérêts
bassement matériels.
La présence d'un triangle et
d'une étoile sur le drapeau indépendantiste
n'est pas un fait anodin. Ces symboles
sont deux figures géométriques
connues depuis des milliers d'années.
Egalement, les couleurs retenues possèdent
une signification particulière.
Pour ce qui concerne le drapeau des
États-Unis, par exemple, le blanc
représente la liberté,
le rouge l'égalité et
le bleu la fraternité. Le
triangle qui figure sur l'estellada
est un triangle équilatéral.
Cette figure possède trois côtés
de même longueur, trois angles
de même mesure (60°) et trois
axes de symétrie. Chacune des
hauteurs issues d'un sommet est aussi
la médiatrice et la médiane
du côté opposé et
la bissectrice de l'angle. Rappelons
que trois dimensions suffisent à
créer l'espace. Traditionnellement le triangle équilatéral
symbolise la divinité. Il réalise
l'unité de la trinité
que l'on retrouve dans de nombreuses
religions (Brahmà, Vishnou, Shiva
- le Père, le Fils et le Saint
Esprit). Mais, il représente
également la stabilité,
la simplicité, la proportion
et l'harmonie. Dans le cas présent,
le triangle bleu foncé représente
le bleu du ciel, c'est-à-dire
l'humanité.
Une
étoile blanche à cinq
branches est située au centre
du triangle équilatéral.
Il s'agit d'un pentagramme. Cette figure
géométrique a été
utilisée dans différentes
cultures avec des significations diverses.
Sa signification varie selon qu'elle
est représentée droite
ou renversée, si elle apparaît
seule ou accompagnée d'autres
signes. Le pentagramme figure souvent
dans les grimoires. Il est alors
censé apporter des pouvoirs
magiques. On observera que l'un des côtés
de l'étoile doit être parallèle
aux bandes sang et or de la partie droite
du drapeau. Il en résulte qu'elle
est légèrement décalée
par rapport aux côtés du
triangle bleu. Cette position de l'étoile
rend difficilement compatible l'utilisation
de l'estellada comme pavillon. Le pavillon
peut se définir comme une pièce
d'étoffe accrochée à
une drisse, hissée à un
mât et servant de signal. Dans
ce cas, il paraît nécessaire
de redresser l'étoile à
cinq branches de façon que son
axe médian se trouve perpendiculaire
au sommet du pavillon. L'étoile à cinq branches
est parfois appelée pentalpha
dans la mesure où on peut considérer
qu'elle est formée de cinq A
enlacés. Le pentagramme, en relation
avec le nombre 5 (symbole de perfection),
représente le microcosme humain.
L'homme possède, en effet, cinq
sens, cinq doigts aux mains et aux pieds
et cinq extrémités (avec
la tête). Il peut donc être
inscrit dans une étoile à
cinq branches. En Chine, le caractère
qui désigne l'homme possède
la forme du pentagramme.
Les Anciens appréciaient particulièrement
l'étoile pentagonale, alors considérée
comme un symbole universel de perfection
et de beauté. Il est fort probable
qu'il s'agissait d'un signe de ralliement
des Pythagoriciens. En effet, le pentagramme
était notamment désigné
en latin par les termes « signum
Pythagoricum ». On retrouve le pentagramme dans des
créations artistiques, sur certaines
monnaies, dans les rosaces des cathédrales,
sur des drapeaux et les insignes de
certaines sectes. Les artistes de la
Renaissance, en particulier Albrecht
Dürer et Léonard de Vinci,
ont souvent repris ce thème dans
leurs productions. Le symbolisme universel
met surtout l'accent sa qualité
de luminaire, de source de lumière.
Le pentagramme est liée au nombre
d'or et au triangle d'or. Le «
nombre d'or » ou « proportion
divine » est un nombre irrationnel
égal à (1 + ? 5) / 2 correspond
approximativement à 1,618. Souvent
considéré comme la proportion
de la beauté, ce ratio intervient
dans certaines constructions naturelles.
Il a été employé
par l'homme en architecture et en peinture.
Les
triangles d'or sont des triangles isocèles
dont l'un des côtés, divisé
par la base, équivaut au nombre
d'or. Il existe en fait deux types de
triangle d'or. Le premier possède
trois angles de valeurs 36°, 36°
et 108 ° et le second trois angles
de valeurs 72°, 72° et 36°.
Un simple coup d'oil sur un pentagramme
permet d'y découvrir à
l'intérieur cinq triangles d'or
de type I et cinq autres de type II.
Le symbolisme de l'étoile solitaire
représente dans le monde moderne
la liberté et, sur les drapeaux,
l'indépendance du pays correspondant.
C'est donc dans la logique des choses,
qu'elle est associée au pouvoir
militaire et figure sur de nombreux
uniformes et médailles.
Le 24 janvier 1839, le Congrès
de la République du Texas adopta
son drapeau. Celui-ci, connu comme le
« Lone Star Flag » (le drapeau
de l'étoile solitaire), devint
le drapeau officiel de cet État
lorsque le Texas s'unit aux États-Unis
en 1845. Divisé en trois parties,
on peut y voir une frange bleu verticale,
située du coté de la hampe,
d'une largeur représentant le
tiers du drapeau et qui symbolise la
loyauté. Au centre, une étoile
de cinq branches blanches symbolise
la liberté.
L'étoile blanche est également
connue à Cuba comme l'étoile
solitaire et symbolise encore la liberté.
Les Catalans ont repris ce symbole qui
proclame clairement, sur le plan politique,
leur volonté inébranlable
et farouche d'indépendance. |